Quand faire le clown dans le ciel était parfois aussi dangereux qu’affronter la chasse allemande durant la guerre de 14-18… En concluant son diptyque consacré à la jeunesse de Buck Danny et à son seul amour, tragique, forcément tragique (à lire dans Casemate 166), Yann et Giuseppe De Luca détaillent la vie folle de ces pilotes, équilibristes, et jeunes filles aux jambes nues prenant tous les risques pour amuser les foules. Des spectacles qui coûtaient cher en vies humaines. Suite de l’interview de Yann, qui rêve de consacrer une série à ces trompe-la-mort oubliés.

Vous montrez un John F. Kennedy amouraché d’une pronazi. Authentique ?
Yann : Absolument, Inga Arvad, journaliste danoise, ex-Miss Danemark, a rencontré et interviewé le Führer qui l’a ensuite invitée dans sa loge lors des JO de Berlin en 1936. Sa liaison avec John F. Kennedy fit des vagues. Je montre le garçon se faisant oublier, commandant un patrouilleur maritime à Guadalcanal, dans le Pacifique. Et nous évoquons, dans un grand dessin spectaculaire, sans paroles, le moment où il faillit y laisser la vie.
Savez-vous si les résultats des analyses de sang de Microbe, le petit frère de Buck, s’amélioreront ?
Qui vivra verra. Le gamin est attachant, et moi je ne demande que ça ! Et je suis prêt aussi à raconter la vie de leur mère.
Une super patriote…
Elle est fière de son pays et participe à l’effort de guerre américain en brodant plus d’un millier de drapeaux, défendant « le respect sacré de la bannière étoilée ». Cette production a d’ailleurs fait la fortune d’un malin qui engagea de nombreuses ouvrières à cet effet. Authentique.
Si à l’époque on embauchait facile, on licenciait encore plus vite.
Oui, je montre dans le premier tome Buck et son père licenciés en une seconde. La raison ? Le jeune Buck, exaspéré, gifle la femme de leur patron qui le serre de trop près. Le père sera ensuite viré aussi sec de son poste de mécano par le patron du cirque aérien qui les emploie.

“Après 1918, les pilotes sont pléthore, les avions ne valent plus rien. D’où ces cascades aériennes”

Une activité très à la mode. Les casse-cou pullulaient-ils tant que cela ?
À la fin de la guerre de 14-18, les pilotes rendus à la vie civile sont pléthores. Et les aérodromes recèlent des stocks d’avions qui ne valent plus rien. D’où la vogue des barnstormers, ces entreprises présentant des cascades aériennes folles. Les participants, en vol, montaient sur les ailes, jouaient au tennis… Les appareils, comme nous le montrons, évoluaient devant les spectateurs en vol dos, au ras du sol. Avec évidemment de jolies participantes aux jambes nues. Dont une mariée montant à une échelle de corde. Jolie fille qui ne laisse pas Buck indifférent. On retrouve des scènes géniales de ce genre sur des petits films d’époque. Mais, évidemment, les morts pendant ces représentations se comptaient par pelletées. J’aurais voulu en montrer bien davantage. Mais sur 46 planches, on peut juste esquisser le sujet.
Cela ne vaudrait-il pas tout un album ?
Bien sûr, vous pensez bien que j’ai déjà imaginé une série sur ce thème. Aucun éditeur n’en veut. Les lecteurs intéressés peuvent toujours regarder La Kermesse des aigles, film de 1975 avec Robert Redford, ou Les parachutistes arrivent, avec Burt Lancaster, de 1969.
Les fans pourront comparer le crash du Lightning de Danny avec celui de Tumbler dessiné par Hubinon dans Les Tigres volants
Alors là, je les attends de pied ferme. J’ai retrouvé des photos de crashs de cet appareil. Donc tout est juste. Un pilote a réussi à rentrer à sa base avec dix-sept impacts sur son Lightning ! Danny n’en a que seize si mes souvenirs sont bons. Pour la petite histoire, c’est aux commandes d’un de ces appareils que Saint-Exupéry a disparu au large de Marseille en juillet 1944.

“Mais les morts, pendant ces représentations publiques, se comptaient par pelletées”

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On a l’impression que vous passez autant de temps à chasser l’info qu’à écrire. Faux ?
Vrai. Je travaille tout le temps. Levé à 6 heures et boulot aussi le soir. Ce qu’on trouve sur le Net est tellement passionnant ! J’ai sans cesse peur de rater une information. Oui, je passe tout mon temps à me documenter. Et à écrire.
Avez-vous des rabatteurs, des amis à l’affût qui vous fournissent des infos sur les sujets que vous aimez traiter ?
Non. Quelqu’un me l’a proposé. C’est vite devenu infernal. Il ne comprenait pas que je trouve certaines de ses trouvailles super, mais qu’elles n’entraient pas dans le déroulé de mon histoire. Ça débouchait sur des engueulades à n’en plus finir. Donc terminé !
Allez-vous continuer le côté science-fiction du dernier Thorgal* qui a désarçonné certains lecteurs ?
Non, j’arrête. Depuis belle lurette, je voulais revenir sur Slive, la magicienne atlante, cette rousse borgne apparue dès le premier Thorgal. Rien ne prouvait qu’elle était morte. Et comme je pensais souvent aux trésors contenus dans l’épave du vaisseau atlante d’où vient Thorgal… Finalement, c’est un sujet actuel. Se servir d’un virus pour détruire l’humanité reste la meilleure solution, la plus simple. Et imaginer une intelligence artificielle prenant le pas sur ses constructeurs aussi.

Propos recueillis par Jean-Pierre FUÉRI
Supplément offert de Casemate n°166 – mars 2023.

* Thorgal #40, Tupilaks, dessin Frédéric Vignaux, Le Lombard, 12,95 €.

Buck Danny Origines #2,
Le Fils du Viking noir,
Giuseppe De Luca, Yann,
Dupuis,
46 pages,
15,50 €,
24 mars 2023.


En attendant Tuckon, Lady X…

La série dérivée Origines devrait comporter au moins six diptyques consacrés aux vedettes des Buck Danny de Charlier et Hubinon. Signe particulier : Giuseppe De Luca devrait tous les dessiner. État des lieux à ce jour.
Sonny Tuckson, scénario Frédéric Zumbiehl.
Lady X, scénario Yann.
Jerry Tumbler, scénario Frédéric Zumbiehl.
Susan Holmes, scénariste à venir.
Slim Holden, scénariste à venir.

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