Enfin, la légendaire trilogie pagnolesque, celle de Marius, Fanny, César et autres inoubliables Monsieur Brun et Escartefigue, revit en version BD. Comme il le raconte dans Casemate 130 (deux pages d’interview, quatre planches commentées, en kiosque en novembre 2019), le dessinateur Sébastien Morice (Facteur pour femmes) pense à Raimu chaque fois qu’il met en scène César, le patron du bar de la Marine. Et imagine une délicieuse Fanny bien loin de celle de la trilogie filmée. Pour Casemate.fr, Nicolas, petit-fils de Jacqueline et Marcel Pagnol, explique comment il gère l’immense patrimoine artistique laissé par l’écrivain, cinéaste et académicien.

Pagnol en chiffres ?
Nicolas Pagnol : 24 livres et déjà 16 BD réalisées par 7 dessinateurs. Si l’on compte les quelques livres que j’ai écrits sur mon grand-père*, on doit arriver à une quarantaine de volumes. Chiffre qui devrait doubler puisque l’adaptation complète de son œuvre en BD devrait comporter 40-45 volumes.
Comment fonctionne la structure Pagnol ?
À travers deux sociétés et un fonds de dotation, je gère les droits de l’œuvre de Pagnol pour le compte de toute la famille. Le site internet nous permet de la faire vivre au quotidien. On y trouve beaucoup d’informations. Je réfléchis à une nouvelle mouture.
Le conseil de famille se tient-il lors d’une grande réunion annuelle ?
Oui, mais cela passe aujourd’hui surtout par Skype. Mon frère habite à Madagascar, ma sœur aux États-Unis et mon père à Nice. Il est beaucoup plus simple pour tout le monde d’avoir un interlocuteur unique plutôt que rencontrer tous les membres de la famille pour discuter. On règle les problèmes entre nous. Lorsqu’une décision est prise, je suis chargé de l’appliquer.

Pas trop compliqué d’avoir plusieurs dessinateurs à la manœuvre ?
Au contraire, c’était le but, chaque histoire ayant son univers particulier, une ambiance, une dramaturgie singulière. Il y a tout un côté provençaliste dans l’œuvre de Pagnol, mais pas que ça. Topaze, Les Marchands de gloire, Jazz, La Prière aux étoiles, Le Premier Amour n’ont rien à voir avec la Provence. Et au sein même de son œuvre provençaliste cohabitent des univers différents. Certains plutôt solaires comme la Trilogie ou La Femme du boulanger. D’autres plus sombres, Angèle, Regain, Manon des sources, Jean de Florette. Chaque fois, il faut trouver le dessinateur collant à l’histoire. Par exemple le dessin des Pestiférés, exécuté par Samuel Wambre, et l’ambiance de l’album sont très éloignés du travail de Morgann Tanco qui met en image les Souvenirs d’enfance.
Toute la série sera-t-elle traduite en provençal ?
Je pense. Excellente surprise : La Glori de moun paire a été un vrai succès commercial. J’ignorais qu’autant de Provençaux s’intéressaient et savaient encore lire le provençal. Un très bon point pour la Provence… et la BD !


Y voyez-vous un regain de régionalisme ?
Oh, les Provençaux n’ont pas besoin de Pagnol pour être chauvins ! Comme les Bretons, d’ailleurs, et tous les gens qui aiment leur région et ont une vraie culture à défendre.
Le théâtre de Pagnol est-il encore à l’affiche ?
On le joue partout en France, quasiment tous les jours. Sauf à Paris. Je pense à mon ami Jean-Claude Baudracco ou à la compagnie Dans la cour des grands. Énormément de compagnies professionnelles – ou pas – ont du Pagnol à leur répertoire.
Sur le site Pagnol, on trouve le DVD de Marius avec Raimu, mais pas les remakes avec Roger Hanin ou Daniel Auteuil : une histoire de goûts ou de droits ?
D’abord, je n’ai pas les droits de ces films, ensuite je gère surtout les chefs-d’œuvre de mon grand-père.
Pas trop handicapant de s’appeler Pagnol avec un accent « pointu » ?
Marrant ! À Paris, on me dit que j’ai l’accent marseillais et à Marseille que j’ai l’accent parisien…

Propos recueillis par Antoine BÉHOUST
Supplément offert de Casemate n°130 – novembre 2019.

* L’Album d’une vie, Flammarion, 2017. Et plusieurs ouvrages de correspondances de Pagnol avec Jean Giono, Georges Simenon, Albert Cohen, Raimu, Fernandel, Cocteau et les autres.

Marius #1/2,
Sébastien Morice,
Serge Scotto & Éric Stoffel,
d’après Marcel Pagnol,
Bamboo – Grand Angle,
44 pages, 14,50 €,
6 novembre.

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