Le gadin de Lanfeust, le voyage dans le Monde Miroir de Ekhö, les petits changements au sein du Lanfeust Mag… Arleston ne vous a pas tout dit dans le Casemate 57. Service spécial avec ses projets futurs, dont une BD érotique !
Demandez-vous toujours à vos dessinateurs de se lâcher, de ne pas s’autocensurer ?
Christophe Arleston : Je leur rappelle que nous sommes des vieux des années 80, que nous ne sommes pas coincés comme les jeunes d’aujourd’hui. Pourquoi ne pas montrer des scènes charmantes de temps en temps ? Les Feux d’Askell, avec Mourier, est la série dans laquelle je suis allé le plus loin. Les mômes qui l’ont lue ne sont pas devenus pour autant des tueurs psychopathes. Aujourd’hui, nous planquons les trucs hard dans le texte ou les situations, de sorte qu’il n’y ait rien de choquant à l’image. Dans le dernier Lanfeust Odyssey, le troll Hébus se retrouve tout seul quand Lanfeust est en pleine nuit de noce avec son harem. On voit Hébus prendre par l’épaule le bestiau qui tire la caravane et l’emmener dans les bois avec un petit cœur. Pas un môme ne comprendra ce qui se passe. Mettre des scènes sexuelles ou choquantes pour le plaisir n’a pas d’intérêt. Autant faire un vrai porno. Ça tombe bien, j’ai ça en projet.
Un vrai de vrai ?
Une histoire érotique de chanteuses d’opéra, avec François Amoretti, l’un des auteurs du Gottferdom Studio, qui a sorti Burlesque Girrrl, chez Ankama. J’ai toujours eu envie d’aborder l’érotisme, sujet passionnant, mais délicat puisqu’on a vite fait de tomber dans le vulgaire. Pour moi, Troubles Fêtes est le bouquin érotique le plus réussi, à la fois hard et jamais vulgaire, grâce au trait et à la sensibilité de Loisel.
Je prépare un projet érotique avec des chanteuses d’opéra.
Signerez-vous Christophe Pelinq, comme pour Chimère(s) 1887 ?
Je n’ai pas encore décidé. Comme l’album sera clairement érotique, donc rangé hors de portée des enfants, je pourrais signer Arleston. Sur Chimère(s) 1887, déposé au milieu des autres BD, il y avait un problème de confusion. Une main enfantine aurait pu l’acheter, pensant y trouver quelque chose de rigolo comme les Trolls ou Lanfeust.
Après l’arrêt de Lord of Burger chez Glénat, faut-il s’inquiéter pour Chimère(s) 1887 ?
Non, l’éditeur nous soutient. Le troisième tome est quasiment terminé. Nous avons commencé à réfléchir au quatrième, sur les six prévus. Je réfléchis déjà à un deuxième cycle. Après Chimère(s) 1887, j’adorerais faire Chimère(s) 1897. Je n’en ai pas encore parlé à Glénat et j’ignore si Vincent aura envie de le faire.
Que prévoyez-vous pour les 20 ans de Lanfeust en 2014 ?
Nous ne nous en sommes pas encore préoccupés, mais il va falloir marquer le coup, en discuter avec Didier Tarquin, Guy Delcourt et le marketing.
Le deuxième Guerrières de Troy serait un chouette cadeau !
Dany m’a promis de finir l’album avant l’été. J’y crois, car il a vraiment envie de boucler cette histoire.
Des nouvelles du Lanfeust dark par Jim Lee ?
Tombé à l’eau, pas par manque d’envie, mais à cause des choix professionnels de Jim Lee. Et puis le projet était piloté par Olivier Jalabert, parti depuis chez Ankama.
Où en est votre projet de BD historique avec Adrien Floch ?
Vengeance, c’est le titre de travail, a évolué. Après avoir beaucoup cherché et tourné, Adrien Floch n’est pas parvenu à se sentir à l’aise dans l’historique. Il n’a pas la même passion de l’Histoire que moi et craignait de se faire engueuler pour un mauvais bouton de veste ou autres imprécisions. Du coup, la série aura un petit côté fantasy, avec une approche historique. Je prépare aussi une série d’antiquité fantastique avec Steven Lejeune. Le Passeur de siècle, titre de travail, est une très vieille idée, écrite à l’origine pour Jean-Louis Mourier, au début des années 90, avant Les Feux d’Askell.
Le projet de Dark Lanfeust, par Jim Lee, est malheureusement tombé à l’eau.
Vos envies ciné ?
En stand-by. Le cinéma est un monde compliqué qui demande beaucoup d’énergie. Pour faire un film, je devrais m’y consacrer à plein temps un an ou deux, donc tout arrêter. Je baisse les bras à l’idée du temps à passer en réunions plutôt que devant mon Mac. Du coup, je remets ça à plus tard.
Vos projets théâtre ?
J’ai terminé l’écriture de plusieurs pièces, mais n’en suis pas entièrement satisfait. Tant que ce n’est pas le cas, je ne montrerai rien à personne.
Vous signez seul vos prochaines séries. Marre des coscénarios ?
J’en ai beaucoup fait parce que j’aimais me confronter à la créativité d’autres scénaristes et à leur imaginaire. J’en ai moins envie. À part Chimère(s) 1887 avec Melanÿn, Ogres avec Audrey Alwett et Ploneïs, le Légendes de Troy avec Jean-Luc Sala, dessiné par Éric Hübsch, je n’ai plus de coscénarios en cours.
L’été dernier, vous râliez contre l’arrêt des directs nocturnes de France Inter…
Ma radio de cœur. J’y ai travaillé, l’écoute depuis toujours. Je regrette les rediffusions de la nuit, le manque de grandes émissions nocturnes qui font la noblesse d’une radio. Heureusement, il en reste encore un peu, grâce à la levée de boucliers des auditeurs.
Avez-vous la tentation de refaire de la radio ?
C’est ce qui me manque le plus. BD et radio sont mes deux passions. J’ai dû choisir entre les deux. L’antenne me manque, le reportage, le montage sont des choses que j’aime profondément et que j’aimerais bien retrouver. Malheureusement, nous n’avons qu’une vie !
Propos recueillis par Paul GINER
Ekhö – Monde Miroir #1,
New York,
Alessandro Barbucci,
Christophe Arleston,
Soleil,
13,95 €,
13 mars.
Illustrations : Ekhö #1, © MC Productions, Arleston, Barbucci. 2013.